Elle avait pensé que le voyage lui paraîtrait long, pourtant, rien ne fut plus faux. De fait, depuis qu'ils avaient dépassé le Bourbonnais-Auvergne, tout lui semblait passer plus vite et il fallait avouer que cela l'effrayait un peu. Non pas qu'elle craignit quelque chose sur le chemin la menant à ses souvenirs d'enfance (son époux avait veillé à ce qu'ils soient bien protégés) mais cette célérité du temps la troublait, elle qui depuis près d'une année vivait dans la lenteur, les mauvaises fièvres, les nuits sans sommeil et les quintes de toux incessantes. Aussi, pourquoi avait-elle accepté cette visite ? Par devoir sans doute, par sincérité encore et peut-être aussi par envie de se sentir vivante comme autrefois. Certes, elle ne ressemblait plus à la femme que le Cardinal avait côtoyé lors de leur dernier revoir, elle avait tant maigri et ses joues étaient encore creusées malgré les soins de son époux, mais, dans ses yeux brillait encore cette petite flamme que ses proches connaissaient bien, celle de la volonté.
C'est donc enveloppée dans une grande cape en laine -malgré la chaleur ambiante- et juchée sur son haquenée qu'elle se présenta devant la herse du château, fort beau Castel au demeurant qu'elle s'amusa à détailler pendant qu'Aubernard, la présentait aux gardes.
Sa Grandeur Von Frayner-Del Casalièr demande accès au château d'Apt.
Tiens, pour une fois son garde n'en avait pas rajouté...Elle l'avisa, surprise, puis elle sourit, amusée finalement par la tentative de son fidèle gardien de paraître distingué.